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Textes pour Monsieur D
16 mars 2011

Mon frère au singe vert

Perspectives.

Il a le sens des perspectives.

 

Une main sûre, directe, précise, trace sur le papier la profondeur. Le coin d’une table, l’angle du mur derrière, la scène vue d’en haut, les objets disséminés, l’arrière plan.

 

Il sait créer l’espace.

Le vertige.

La profondeur.

 

Perspectives.

Perspectives d’avenir ?

 

Vertiges.

 

Il se promène dans son espace, l’espace de sa feuille blanche dessinée, l’espace qu’a tracé sa main sûre, directe et précise. Il s’envole entre les immeubles verticaux, tombe dans les gouffres béants, zigzague dans les dédales d’objets inertes, flotte en apesanteur…

 

Changer d’angle de vue. Voir le monde sous un angle différent.

 

C’est un oeil qui cherche. Qui scrute. Profond.

 

Il se promène dans son espace. Il déambule en Chateaubriand, romantique et sombre, jetant toute sa passion dans les landes du XIXème. Il se contorsionne en Miles Davis, fêtard et alcoolique, jetant toute sa passion dans les tripots des années 30. Il s’embrume en John Day, jouisseur et nihilise, jetant toute sa passion sur les routes américaines de années soixante-dix.

 

Il vit ses rôles. Comme un excutoire. Comme une façon d’habiter son espace.

 

Son espace si profond.

 

Ses rôles ?

Question de point de vue…

 

Il se promène dans son espace. Une petite chambre enfumée, d’étudiant. Des équisses, des tableaux, des ratés. Un sax qui attend. Des frustations qui flottent dans l’air. Un ordi, des chaussettes sales, des capottes dans l’étagère, des CD éparpillés, une veste du grand-père, des fringues lookées, un viel agenda corné, le programme ciné, un ticket resto de maman…

 

Tu parles d’un rôle !

Imposteur.

 

Sa main hésite, gribouille, rature. Le trait se cherche. Se scrute. Profond.

 

Une seule certitude : dans sa vie ou sur le papier, ce putain de vertige, il sait le créer.

 

Vertige des profondeurs, s’allume un joint, pourquoi pas aussi avec un petit verre de wisky, allez ce soir j’aggrandis l’espace, je laisse sortir la matière, et encore un petit verre, comme les verres en cristal, le grand cru rosé et le costard, sortir la matière comme sortir le grand jeu, je lui en ai mis plein les yeux, hein, elle l’a aimé le personnage, MON personnage, le petit verre de liqueur du père le soir, il l’aime le fils, hein, il l’aime, hein ?!? Au moins comme maman, c’est sûr, il faut qu’il l’aime au moins comme maman…

 

Il aggrandit l’espace, laisse sortir la matière, son petit singe vert.

Grimaçant.

 

Chut !

 

Chute.

 

Son petit singe vert – grimaçant – connaît papa, connaît maman. Son petit sing vert – grimaçant – doit forcément connaître l’imposture.

 

 

Sa main hésitante, douloureuse, triste, tape sur le clavier. Des mots tranchants. Lucides. Trop lucides.

 

La chute : les doutes.

 

Les doutes n’aiment pas les perspectives

D’avenir.

 

La main sûre, directe et précise reprend le crayon, trace la ligne, remonte la pente, décroche le sommet, négocie les virages.

 

 

 

 

Chateaubriand, Miles Davis, John Day et le petit singe vert – grimaçant.

Plusieurs cartes à jouer. Pour créer son jeu complet.

Entre bluff et sincérité. Imposture et vérité. Pocker.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
Textes pour Monsieur D
  • J'avais depuis longtemps envie d'écrire, mais je ne savais sur quoi, sur qui et vers où. Monsieur D, un ami, m'a proposé de me donner un mot par jour ou tous les deux jours... Voyons où cela va me mener....
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